Institut Rhônalpin d'Analyse Transactionnelle 
et approches pluridisciplinaires
 
Newsletter N° 17 - Novembre 2016 
 

Bonjour,

 

Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler de Transfert et de contre transfert, et plus exactement de
"l’agir du protocole" dans le contre transfert.

 

Dans son livre "ça n’empêche pas d’exister" (Seuil 1985) Octave Mannoni raconte ces déboires avec une de ces patientes qui a beaucoup de mal à parler, mais qui a aussi beaucoup de mal à quitter le cabinet à la fin des séances. Sur le divan, elle rompt le silence en levant ses jambes en l’air d’une manière indécente, elle jette au plafond le paquet de mouchoirs qu’elle tient à la main, et elle crie ‘’merde, merde, merde !’’. Le psychanalyste n’a pas très envie de s’occuper d’elle. Pendant un moment, il envisage de l’adresser à un autre analyste, mais il ne s’y résout pas. Il préfère attendre un changement, en supportant cette situation inconfortable. Le thérapeute se rend compte que, à chaque fois que la patiente lâche ses mots scatologiques, lui le professionnel, tourne le regard vers la plante posée sur son bureau. Cette plante est une Ferula narthex, plus communément appelé Férule. Cette plante possède une hampe florale qui peut faire plus d’un mètre, se dessèche en devenant à la fois légère et très dure. C’est pourquoi elle a été utilisée dans l’antiquité pour taper sur les doigts des écoliers. C’est d’ailleurs devenu une expression : "être sous la férule de quelqu’un", c’est être soumis à son autorité. Il se trouve qu’Octave Mannoni a fréquenté, enfant, une école de village dans un pays méditerranéen, et il y a reçu des coups de férule.

En portant ainsi attention à ses propres associations, le thérapeute ne peut que reconnaitre son souhait inconscient : que la patiente soit corrigée pour son comportement sur le divan. Il se laisse alors aller à différentes considérations littéraires qui dessinent le thème de la honte.

 

Swann qui, après avoir lu par transparence une lettre d’Odette à son amant, faisait une grimace compulsionnelle dès qu’il y repensait. Ou encore Sartre racontant qu’enfant, il allait faire des grimaces devant un miroir quand il était saisi de honte. Et puis le thérapeute réfléchit à la différence entre des sociétés où l’éducation s’appuie sur la culpabilité et celles où elle utilise la honte.

Pendant ce temps, la patiente reste dans le silence, seulement interrompu par instant par ses exclamations scatologiques.

Un soir, alors que Octave Mannoni est en train de lire "le journal de Gombrowicz", le thérapeute se surprend à répéter à voix haute et compulsivement une phrase qui n’a pourtant rien de particulier. Il relit alors la page. La phrase qui précède lui rappelle un souvenir dont il n’est pas très fier. Lui vient alors cette question : quelle honte ancienne peut bien faire agir sa patiente d’une façon aussi compulsive ? D’une manière plus spectaculaire que le geste de Swann, les grimaces de Sartre ou sa propre lecture à voix haute.

Lors des séances suivantes, le thérapeute n’a pas besoin de communiquer cette interprétation à la patiente. Pas besoin de lui poser la question "quelle honte ?", ça sonnerait trop près de "quelle honte !". Il garde pour lui l’interprétation (ce doit être la honte), mais sa position dans le transfert est désormais différente. Ses interventions ne sont plus marquées par cette affaire de honte, il n’est plus dans cette position d’instituteur dans laquelle le transfert l’avait bloqué. Il n’écoute plus la patiente avec une férule à la main. Et le changement arrive finalement de son côté, elle peut commencer à lui parler…

 

Eric Rolland, directeur de l’Institut.

 

 
 

 

Les ateliers à venir  :

 

 

Des mots pour dire la sexualité :

Aborder la sexualité avec nos patients et parfois complexe pour le thérapeute. Tellement complexe, que parfois il y a tout un pan de l’histoire, du présent, des fantasmes du patient qui ne sont pas abordés en séance, comme si les deux partis dans une entente inconsciente c’étaient mis d’accord pour taire le sujet, ou à peine l’aborder que cela soit en séances individuelles et parfois même en séance de thérapie de couple.

C’est pour vous accompagner à développer des compétences pour aborder, comprendre et travailler avec la sexualité de vos patient(e)s que nous mettons en place un cycle de formations sur la sexualité et sur la thérapie de couple.

 

Notre premier séminaire :"Sexualités et crises identitaires" aura lieu le lundi 28 novembre 2016.

 

Le jeudi  1er décembre 2016 et le vendredi 27 mars 2017 se dérouleront nos ateliers sur
 la thérapie de couple et de famille en systémique.

 

 

Pour plus d’informations, nous vous invitons à vous rendre sur le site de l’Institut.

 

 

 

Du côté des livres  :

 

 

« Ça n’empêche pas d’exister », Octave Mannoni .Seuil 1985.

 

Résumé :

Le pire danger qui pourrait menacer l'analyse, ce serait de substituer son pouvoir à celui de la médecine, qu'elle a si justement critiquée. Règle cardinale qui doit guider aussi bien l'analyste dans le travail clinique - pour le dire abruptement, le transfert doit tourner à l'avantage de l'analyse, non de l'analyste - que dans l'évaluation de la théorie - l'analyse n'est pas une science positive et sa seule vérité, c'est que la vérité est refoulée, une vérité jamais une fois pour toute révélée mais suspendue à l'aventure de l'interprétation.
« La théorie écrivait Freud après Charcot, ça n'empêche pas d'exister. » Le redire n'est pas négliger la portée cruciale de la métapsychologie mais rappeler que l'analyste est un homme d'expérience et que, de celle-ci, la clé est dans l'interprétation où, chaque fois, ce sont deux inconscients qui, l'un à l'autre se répondent.

 

 

Et pour se mettre en appétit avant notre séminaire du dimanche 5 et du lundi 6 mars 2017 (première partie d’une formation sur 3 ans) : "théorie des caractères Reichiens", nous vous conseillons la lecture de deux livres :

 

 

"Introduction à la psychanalyse de Reich" et "Psychanalyse corporelle et sociale" de Jacques Lesage de La Haye, chez Chronique Sociale, octobre 2014.

 

 

 

 

Pour toutes informations pratiques et inscription à ces ateliers ou formations, nous vous invitons à vous rendre directement sur notre site www.institut-rhonalpin-at.fr ou à nous contacter à l’adresse suivante : institut.at@gmail.com

 

Eric Rolland,

Directeur de l’Institut.